Bonjour
je viens de lire ton post et les réactions qui s'ensuivaient.
J'ai moi même été hypocondriaque à un degrés certes plus léger que ton mari mais suffisamment important que cela me bouffe longtemps et empiète sur les relations que j'ai pu avoir avec mon entourage (mes amies notamment, mon mari à plus petite dose)
Je me souviens pertinemment de la façon dont tout cela a commencé.
1994 : 1er Sidaction à la TV. J'ai 11 ans et je suis persuadée que je suis séropositive. Je ne comprends pas les modes de transmissions et me persuade (pour je ne sais quelle raison) que je l'ai attrapé et que je vais mourir.
Comme ton homme, je cherche des tâches sur mon corps(c'est cet épisode que tu as décris qui me pousse à te répondre) et j'attends qu'un Sarcome de Kaposi confirme mon SIDA.
Je pleure souvent et ne m'explique pas pourquoi j'ai peur.
Les années passent, je comprends que je ne PEUX pas être infectée, mais ma peur est irrationnelle, elle m'obsède, s'estompe, reprends le dessus... Bref un cauchemar bipolaire en quelque sorte ...
De ça je n'en parle pas : je suis jeune, et même si le sexe n'a jamais été tabou chez nous, avouer à ma mère que je pense être séropositive à 16 ans est infaisable.
Cette peur s'estompe... d'autres viennent.
Le cancer, la crise cardiaque, les AVC... mes phantasmes se nourrissent des cas réels autour de moi...
Mes amies me traite de folle, en rient puis comprennent que cela m'obsède t tentent de me raisonner.
Je suis tout le temps chez le médecin qui lui, sans une once de psychologie, me prescrit tous les examens que je lui demande.
Mais passer une radio me terrifie : je me fais mon film : découverte de ma "maladie", agonie, mort...
certaines de mes amies ont fait des études de médecine. Les pauvres. Je les harcelais pour avoir confirmation que ces symptômes grippaux cachaient en réalité quelque chose de beaucoup plus grave.
Je me faisais violence pour ne pas les appeler en plein milieu de la nuit à cause d'une migraine.
Elles, me soutenaient comme elles pouvaient mais je sentais de l'exaspération de leur part.
Mes parents eux n'y ont jamais beaucoup prêté attention.
J'avais peur qu'ils s'inquiètent , j'avais peur de les rendre malade si ils apprenaient que j'allais mourir.
C'était une obsession totalement morbide qui m'a gâché de beaux moments mais heureusement, jamais une amitié.
Bizarrement, je suis devenue beaucoup plus zen lorsque j'ai appris ma grossesse alors que je pensais fermement que mes crises s'aggraveraient.
Mais je savais aussi que si je laissais les choses s'engluer, c'est mon bébé qui en souffrirait.
Heureusement, car mon mari commençait à s'agacer sérieusement... et surtout j'étais très malheureuse de voir que beaucoup rigolaient de certaines anecdotes alors que pour moi, c'était dramatique... vraiment dramatique.
Je n'ai pas été voir de psy. Je n'ai pas eu de thérapie cognitive. J'ai eu un petit déclic avec la venue au monde de mon fils.
Mes peurs sont toujours très présentes. Je fuis les discussions où j'apprends la maladie , la mort d'untel ou untel.
J'évite ces sujets qui me font parfois cogiter des nuits entières.
J'ai trouvé un autre palliatif : la tête de l'autruche.
Je me focalise sur mon fils, moi je m'en fous.
Moyen moyen en somme, puisque je néglige ma santé.
Donc, non : nous ne sommes pas hypocondriaque pour se rendre intéressants. Nous avons très peur. Nous sommes dans le même état qu'une personne qui apprendrait qu'elle va mourir. Nous évaluons sans cesse des risques inexistants.
Nous extrapolons nos douleurs jusqu'à les ressentir.
Il m'arrive parfois , lorsque mon mari est en déplacement, de me dire "Il ne faut pas que je fasse de crise cardiaque aujourd'hui, je suis seule à la maison avec mon fils, je ne dois pas le laisser seul dans une maison . Mais ma mère appellera à telle heure, comprendra qu'il s'est passé quelque chose, du coup, viendra ..."
Vois tu le cheminement que cela peut prendre ? Le mal que l'on peut se faire ?
Mettre ça sur la faute de sa mère est injuste. toutes les mères poules ne font pas des enfants hypo.
C'est un petit traumatisme je pense , qui a évolué, et ne m'a pas laissé de répits.
J'ai dû être choquée, avoir très peur de voir ces corps abîmés, de ces durées de vie pleine de souffrance et très courtes que l'on nous montrait au Sidaction.
J'ai juste eu peur, je n'en ai pas parlé, on ne m'a donc jamais expliqué et j'ai phantasmé.
Voilà pour moi.
Je conçois que pour toi cela soit dur à supporter mais crois moi sur parole, c'est horrible pour lui.
Tant qu'il n'en sera pas conscient et qu'il ne sera pas décidé à se faire aider, il n'y aura pas de solutions.
C'est à lui de se réveiller.
Je suis désolée, car mon message ne t'apporte aucune solution. J'espère que tu pourras en tout cas comprendre que ce n'est pas pour faire son intéressant comme j'ai pu le lire, ce n'est pas sa mère qu'il faut blâmer.
C'est lui, lui tout seul que se mets ça en tête. Et il souffre du paradoxe de se faire de se faire du mal, de se croire gravement malade et t'inclure dans ses délires.
demande lui peut être qu'il te décrive ses sensations, son mal être, sa peur dans ses moments là. Je pense qu'il se sentira compris. Il appréciera qu'on ne remarque pas que le côté irrationnel et disproportionné de ses peurs mais que l'on cherche à en comprendre le mécanisme et qu'on ne s'en soucie.
Ne pas s'inquiéter mais s'intérresser.
Le voilà le conseil finalement.
Courage !