Eden
Tu as été (e ) conçu (e ) le 4 mars 2010, quelques minutes après que ton papa aie exprimé son envie d’un deuxième enfant.. J’ai su que tu étais là dès le début, je le sentais… on est allés au concert des Cranberries, tu étais là, avec nous…
J’ai fais plusieurs tests pour avoir la certitude de ta présence, jamais déçue quand ils étaient négatifs, car je savais…..je me disais juste que ça se verrait un peu plus tard… et c’était vrai !!!!
J’ai annoncé ta venue à ton papa un soir, le 17 mars, sur la chanson de Renaud « en cloque »…. Moment d’émotion et aussi d’humour….
J’ai eu très peur pour toi quand j’ai reçu un coup dans le ventre au travail, mais il n’a pas semblé y avoir de conséquences… si ce n’est ma peur grandissante à l’idée d’aller travailler chaque jour…
Je t’ai vu (e) pour la première fois le 15 avril à l’échographie, tout était parfait, tu faisais de légers mouvements, tu étais niché au fond de ton petit nid… tout était si rassurant… j’y ai cru…..
Puis nous sommes partis en Auvergne, ton papa, moi, et ton frère Titouan, pour une semaine de vacances ressourçantes, après un WE rencontre avec les filles du forum…. Plein de bonheur... et tu étais là, tout ce temps, tu te faisais connaitre en prenant déjà de la place, mon ventre s’arrondissait déjà, et en me donnant quelques nausées, enfin pas trop…
Les projets se précisaient, ton arrivée était prévue pour le 4 décembre : un joli cadeau en ce mois magique…. Et puis ça tombait très bien, je me disais que cette grossesse allait être la transition idéale pour me permettre de quitter mon boulot et de faire un projet qui me tient plus à cœur à mon retour de congé mat…..
Puis est venue la date de l’échographie : le 14 mai… nous avons attendu un moment dans la salle d’attente, ton papa n’étais pas du tout stressé (ce qui l’étonnait, mais il n’arrêtait pas de dire que ce n’était pas comme pour Titouan …)
La sage femme a posé la sonde, et j’ai vu aussitôt…. Tu n’avais pas la taille qu’il fallait… tu étais si petit, un petit haricot, posé là, immobile… et ton cœur ne battait plus….. depuis environ 2 semaines…
Tout s’est effondré à ce moment là… j’ai eu le temps de penser bizarrement que c’était ça alors qu’on ressentait quand on perdait son bébé…
Je n’ai pas voulu aller à l’hôpital, je ne voulais pas être médicalisée, et je ne voulais pas qu’on t’enlève à moi en t’aspirant, comme une simple poussière sans vie… alors on est rentrés à la maison, ton papa et moi, je me rappelle cette sensation de brouillard épais qui m’entourait….
Je croyais que si cette situation devait m’arriver un jour, je serais pressée qu’on ôte ce corps mort de moi... Mais ça n’était pas du tout ce que je ressentais en fait… tu faisais partie de moi, tu étais encore un peu là…. j’ai décidé de laisser faire la nature, j’ai pris de l’homéopathie et des choses naturelles pour aider mon corps… et on t’a parlé avec ton papa ; on t’a dit que maintenant on savait que ton petit cœur ne battait plus, et que tu pouvais t’en aller…. Et j’ai commencé à saigner, le soir même…
Le lendemain, je ne saignais plus, je ne comprenais pas. J’ai bu de la tisane de sauge pour déclencher des contractions. Puis on a fait la route pour aller chez mes parents… et j’ai eu des contractions plutôt douloureuses sur toute la route…
Aussitôt arrivée chez mes parents, je suis allée aux WC …. Et je t’ai senti glisser hors de moi, ça a été si vite… tu es tombé là, chez mes parents, à l’endroit même où j’ai grandi, passé mon enfance…. Tu as choisi de partir à l’endroit où j’ai commencé ma vie… quelque part ça m’a apaisé… je t’ai laissé partir…
J’ai passé ensuite 6h atroces, dans la douleur physique la pire que j’ai jamais vécue, avec des contactions à se tordre de douleur, une hémorragie, des vomissements… moment très difficile à vivre, d’autant que je n’avait rien pour me motiver, je souffrais comme pour un accouchement, mais je ne t’aurais pas dans mes bras à la fin… je peux dire que j’ai accouché de toi, même si c’est après ton départ que j’ai souffert, mais en même temps ça n’avais rien d’étonnant que les choses se fasse à l’envers, ce n’était pas la vie mais la mort que je donnais…
Heureusement, j’ai été bien entourée.
Les suites de ton départ ont été vraiment difficile, il y a eu la tristesse, une tristesse profonde, de celles qui empêche de voir ce qu’il y a autour… je souffrais de t’avoir perdu, après 3mois à me projeter dans le futur, avec toi en moi …
Puis j’ai vécu ensuite la colère, la colère contre toi notemment… je m’en veux aujourd’hui, mais je t’en ai voulu, d’être arrivé (e), porteur d’espoir et de bonheur, personnellement et professionnellement en ce qui me concernait… et d’être parti tout à coup, sans prévenir, en anéantissant tous les espoirs, en faisant si mal…
Mais j’ai pu prendre du recul, avec le temps, et avec l’aide d’une personne que je devais sans doute rencontrer à ce moment là, qui m’a ouvert les yeux sur beaucoup de choses…
J’ai accepté ton départ, car c’était comme ça, malgré tout tu avais été là, tu étais parti mais pas sans raison, il y a une raison pour chaque chose…
ça a été douloureux pour nous, pour moi, mais tu avais peut être un rôle, celui de me donner l’impulsion nécessaire pour enfin changer ce boulot qui me pourrit la vie… celui de me faire comprendre que je ne dois pas fonder mes espoirs professionnels sur la venue d’un bébé, mais que je dois me bouger et faire en sorte que les choses changentde moi même, ce n’est pas le rôle d’un bébé… et que si je fais ça, je serais d’autant plus apte à accueillir un bébé, dans la sérénité…
Je te remercie car même si tu n’es pas resté (e), tu m’as permise d’être enceinte en même temps que ma meilleure amie, nous le souhaitions tellement…
Je sais maintenant que tu ne devais pas être parmi nous, que c’était écrit comme ça… et tu le savais surement …
Je me dis que tu es à coté de moi, quelque part, que tu veille sur nous… j’espère que cette expérience me rendra plus forte, qu’elle m’apprendra à mieux me connaitre, et à ne plus accepter de faire des choses qui ne sont pas moi…. Pour que ton passage n’aie pas été vain….
Je ne t’oublierais jamais…..