Bonjour,
Pour m'aider à tourner la page, j'ai décidé de poser à l'écrit un récit de ces derniers jours.
Je suis l'heureuse maman d'un petit garçon, Eliott, qui a 22 mois, et nous étions aussi les heureux futurs parents d'un mini-nous-bis, qui était prévu pour le 05 avril 2013.
Dans le courant du mois d'août, suite à des pertes sanglantes, on me diagnostique un décollement du placenta. Nous restons relativement calmes face à cette annonce, mais bien sûr, nous prenons toutes les dispositions nécessaires : arrêt de travail ; pas porter ; allongée autant que possible ; éviter voiture... et mon mari a parfaitement jouer le jeu en me soutenant du mieux qu'il pouvait et en gérant la maison à la façon d'un logisticien !
Plus aucune perte pendant un mois.
Alors bien sûr, on se projette, on s'imagine notre vie à quatre en avril, la présentation de bb2 à Eliott, sa chambre de "Grand" et celle faite pour Numérobis, on commence à lire des histoires où on parle "d'attendre un petit frère ou une petite soeur", on se voit grossir du coup on fait le tri dans les vêtements, mon mari envisage de vendre l'une des deux voitures qui va devenir trop petite etc etc... Tous ces petits signes qui font que même à 6/8 semaines de grossesse, Il est là et il est bien là.
Mais une écho de contrôle à 9 semaines de grossesse indique un embryon plus petit que la normale et une activité cardiaque plutôt faible, des signes qui font dire au gygy que la grossesse est peut-être en train de s'arrêter.
"On se revoit dans 15 jours ? Si vous avez fait une fausse couche d'ici là on vérifiera que tout est bien parti..."
Je n'entends plus rien, je ne comprends plus rien. C'était pas prévu, je ne l'avais pas envisagé on m'avait dit que c'était un décollement placentaire ??? De quoi me parle-t-il ? Il s'est trompé de patiente, ce n'est pas possible...
Et bien sûr, je cherche et recherche sur le net, autour de moi, tout ce qui peut me faire dire qu'il s'est trompé. Tout. "Ahh bon Maman tu as eu un problème de retard de fécondation pour moi ? Je suis arrivée avec 15 jours de retard ??? Et mon frère aussi ? Ahhh voilà qui explique tout alors !".
Mais une semaine plus tard de retour aux urgences car saignements ++. "C'est surement le placenta..." Mon Dieu que je suis conne !
"Pas d'activité cardiaque. Probable fausse couche. On se revoit dans 5 jours."
5 jours ; 15 ans ; 1 siècle... ça n'a absolument aucun sens pour moi puisque de toute façon la notion du temps m'est étrangère depuis les mots "fausse couche" ; "pas d'activité cardiaque".
Alors là, on prend sur soi, encore et toujours parce que vous savez bien "le monde continue de tourner", et c'est vrai il continue de tourner on a juste l'impression qu'il le fait parfois sans nous !
Relativiser, relativisons vite j'en ai besoin : j'ai conscience d'avoir un magnifique petit garçon, que tout le monde n'a pas cette chance, et que ce n'est que partie remise.
Prendre sur soi, prendre sur soi, prendre sur soi... Chez moi le savoir prendre sur soi est passé, MALHEUREUSEMENT et au grand désespoir de mon mari qui lui avait vu clair, par un infime espoir d'erreur basé sur le mot "probable" et sur le fait que, "mince, mais il est là, il est bien là, d'ailleurs les symptômes de grossesse je les ai, je les ai bien !"
10 septembre, écho : plus de trace de vie. Voilà c'est fini et bien fini. Je ne sais plus lire, écrire, ni comment je m'appelle, mais maintenant ça suffit il faut que je l'accepte.
Gygy : "un curetage et on en parle plus ou vous préférez un traitement médicamenteux ?"... Dans les histoires vraies la carte Jocker elle n'existe pas. Va pour du Cytotec. "4 cachets en 1 seule prise au fond du vagin"
Nous décidons que les médicaments seraient pris en fin de journée pour que mon mari soit avec moi pendant cette épreuve.
21h : médoc pris.
21h30 : Rien, tout va bien. Comme j'avais surfé sur le net quant aux effets du Cytotec, je prends soin de prévenir mon mari que 1/ je vais avoir mal au ventre probablement 2/ que je vais saigner beaucoup, mais qu'il ne s'inquiète pas.
22h30 : les saignements sont impressionnants, des contractions violentes.
23h30 : caillots énormes, je ne les comptent plus, fatigue intense "c'est normal tous ces caillots, c'est normal, et puis les vertiges aussi...enfin je crois..."
0h00 : moi dans un état second, mes jambes ne me portent plus/mon mari : "t'es sûre que c'est toujours normal ? t'as vu la taille des caillots ???!! ohhh répond moi ! répond moi ! J'appel le Samu !" "Non c'est nor m a l..."
Médecin Samu : "Donnez à votre femme du spasfon, y'a rien à faire ! les saignements sont impressionnants pendant une fausse couche mais c'est normal"
1h00 : mon mari vs Samu, deuxième appel "Monsieur je comprends que vous soyez inquiet pour votre femme mais je vous ai dis que les saignements n'étaient pas une donnée recevable dans le cadre d'une fausse couche" "Ecoutez moi, il faut appeler les pompiers tout de suite elle saigne beaucoup trop et elle a perdu connaissance !"
1h45 : arrivée des pompiers aux urgences, je me sens un peu mieux parce que la perf commence à faire son effet donc moins mal au ventre. Par contre, caillots de la taille d'un ballon je ne pensais pas qu'on pouvait saigner autant...oups malaise vagal...et Re malaise vagal...
Taux d'hémoglobine désastreux
3h30 : Transférée dans un état pitoyable en Gynécologie pour "passer la nuit" (lol !).
4h00 4h30 5h00 5h30 6h00 6h30 Des caillots du sang des caillots du sang
7h00 : "Bonjour, infirmière, équipe du matin. Vous allez au bloc pour un curetage tout de suite, vous faites une hémorragie ! vous avez trop attendu Madame avant de venir !" Je ne peux plus retenir mes larmes, je suis à bout, j'ai mal, je suis exténuée, mon mari n'est pas encore arrivé, il ne va pas savoir où je suis, je ne sais même pas comment ça se passe un curetage, est ce que d'ailleurs je dois vraiment y passer ?
8h00 : "allez détendez vous, partez sur un lieu que vous appréciez particulièrement. A tout à l'heure..." j'ai voulu dire : "mais attendez on ne m'a pas expliqué ; j'ai pas dis à mon mari ce qui se passe ; et mon petit garçon ?"
10h00 : en salle de réveil, je n'ai plus mal au ventre et je me sens relativement bien "humm j'ai mal à la gorge ?" "ahhh oui normal ! on a dû vous intuber parce que vous étiez tellement nerveuse !" Ne pas répondre, de toute façon tu veux juste voir ton mari.
Mon mari est resté avec moi autant qu'il a pu. Je suis restée hospitalisée jusqu'au lendemain matin. Physiquement, fatiguée mais tout va bien, psychologiquement c'est pas la frite mais je prends sur moi, et ça va.
La dernière épreuve fut la sortie : la gynécologie et la maternité sont côte à côte et les sorties se font en même temps... je vous laisse deviner le film : ils étaient aussi heureux et léger tous ces parents que j'en avais gros sur la patate !
Baby blues m'a tenu compagnie une demi journée environ, avec des envies de pleurer complètement incongrus.
Aujourd'hui je vais mieux, je ne souhaite pas en parler à mes proches, je les aime de tout mon coeur, mais il y a des mots et des expressions que je ne peux plus entendre ! lol ! Le principal c'est que je les ai tous senti présents et je les en remercie de tout coeur. De tendres pensées à quelques personnes en particulier qui savent de quoi je parle dans ce récit. L'une d'elle m'a écrit : "tu as le droit d'être malheureuse". J'ai trouvé ça juste super parce que même si je ne me suis pas permise de l'être, ça fait du bien de le savoir.
Je souhaitais faire part de mon expérience pour tourner la page et parce qu'aussi banale qu'elle puisse paraître, la fausse couche c'est toujours une fin en soi, au sens propre et au sens figuré.
Je voudrais déjà être de nouveau enceinte ou n'avoir jamais eu à ne plus l'être ! D'après ce que j'ai compris, je dois attendre mon retour de couche + un cycle, et puis on pourra recommencer les essais...
Je vous souhaite à toutes, de beaux bébés.