Voici l'histoire de la naissance de ma petite fille, Lola, née beaucoup trop tôt.
C'est un long récit, je ne vous demande pas d'aller jusqu'au bout; moi, ça m'a juste fait beaucoup de bien de la narrer.
L’ANNONCE DE LA GROSSESSE
Le 13 juin 2006, j’annonce à mon amoureux que nous attendons un bébé ; nous sommes tombés dans les bras l’un de l’autre et avons versé des larmes de bonheur. Premier essai : pari réussi d’emblée !
LES PREMIERS SYMPTOMES DE LA GROSSESSE
Très vite, les nausées me pourrissent la vie ; je ne peux plus faire quoi que ce soit sans avoir à longueur de journée ces foutues envies de vomir. Ça a duré jusqu’à la fin du 4ème mois et du jour au lendemain, plus rien : ouf !
DEJA, LES PREMIERES CONTRACTIONS
Malheureusement, très vite après, des contractions de plus en plus régulières me faisaient frémir ; j’en parlais sans cesse aux sages femmes qui me suivaient chaque mois, mais leur seule et unique réponse était : « Prenez du spasfon ».
Les contractions se faisant de plus en plus fortes et régulières, j’ai fait un premier séjour à l’hôpital et en suis ressortie rassurée : bébé allait très bien et moi, il fallait que je me ménage un maximum.
LES SEJOURS A L’HOPITAL ET LES PREMIERES ANGOISSES
Dix jours après le premier séjour, rebelotte : urgence et hospitalisation pour modification de col cette fois-ci : mou et centré selon les dires du gynéco, qui, sois disant avait senti la tête du bébé au toucher. On me fait deux piqûres de corticoïdes, au cas ou. Monito soir et matin : bébé va bien.
On me laisse rentrer chez moi deux jours après avec un traitement lourd sous Adalate et on me classe sous la catégorie MAP. Ce mot va me hanter jour et nuit. Interdiction formelle de faire quoi que ce soit si ce n’est rester couchée toute la journée, la nuit et re-la journée, la nuit …
DE MAUVAISES INTUITIONS ME HANTENT
Une semaine après jour pour jour je me rends à nouveau en urgence à la mat car chaque matin, en me levant, j’étais gonflée … non, extrêmement boursouflée de partout : les jambes, les pieds, les bras, le visage, les yeux tellement gonflés que je ne pouvais meme plus les ouvrir. On me fait une prise de sang, on me taxe d’anxieuse et de stressée : « profitez donc de votre grossesse madame voyons » et on me change de traitement en me soulignant bien que les allergies à l’Adalate était extrêmement rares ….. Il fallait évidemment que ça tombe sur moi !
Le soir meme une sage femme de la mat m’appelle et me précise que la prise de sang qu’on m’avait faite n’était pas bonne sur un des marqueurs, qui était trop élevé (c’etait le mercredi 5 décembre 2007). Elle me demande de passer à la mat deux jours plus tard (donc le vendredi 7 décembre 2007) pour repasser un monito, juste pour s’assurer que bébé se porte bien.
VENDREDI 7 DECEMBRE 2007 : UN JOUR EN ENFER
On me fait rentrer dans la salle de travail et on met en route le monito. Ma maman m’accompagnait ce jour là, pour me détendre et me changer un peu les idées noires que j’avais en permanence dans la tête.
Trente minutes après le commencement du monito, la sage femme regarde les tracés, fait une drôle de tête et revient deux minutes après. Pendant ce temps là, maman essaye de me faire rire pour me changer les idées et là, voilà les paroles de la sage femme : « je pense que vous allez moins rire quand je vais annoncer ce que j’ai à vous dire. Le cœur du bébé ne bat pas bien du tout ; vous allez être transférée en urgence à Nancy, à la maternité régionale, en hélicoptère. » Là je m’effondre littéralement et la suite des événement reste assez flou dans ma mémoire ; j’ai des trous noirs sur pas mal de moments dans la journée.
Maman appelle mon amoureux qui est au boulot. Entre temps, la mat a finalement appelé une ambulance car il y a trop de vent pour l’hélico.
A peine mon chéri arrivé, on m’emmène direction l’ambulance, sous oxygène ; j’ai à peine le temps d’entendre la sage femme dire au médecin qui m’accompagne que je suis une MAP mais avec un col fermé et long (ah bon ? il a donc eu le temps de se refermer en une semaine ?).
Mon chéri et ma mère suivent l’ambulance, mais eux restent coincés dans les bouchons ; imaginez l’angoisse ….
J’arrive à Nancy, une interne m’examine, me pose un tas de questions à la con, auxquelles j’ai absolument pas envie de répondre. Je n’ai qu’une seule chose en tête : que va-t-il arriver à mon bébé d’amour ?
Un médecin rentre dans la pièce et me fait une écho ; je l’entends donner les mensurations à sa collègue et elle de répéter à chaque donnée : « c’est trop petit, c’est trop petit ». Ma fille se présente en siège (alors comment le gynéco a pu précédemment sentir la tête ?).
Enfin mon chéri et ma mère peuvent venir me voir à tour de rôle ; des tonnes de larmes ont été versées ce jour là, jusqu’à ce qu’un chirurgien, celui qui m’opèrera, vienne me voir et me lance avec une froideur accablante: « bon écoutez, c’est pas compliqué, vous faites une pré éclampsie, vous avez 18 de tension, vous reins ne fonctionnent plus et le placenta ne fait plus son boulot, donc si j’opère pas maintenant, demain matin y a plus de bébé ». le monde s’écroule à nouveau. Ce que je n’ai pas entendu à ce moment là et que j’apprendrai le lendemain matin c’est que ma vie aussi était en péril et que s’il n’était pas intervenu, je ne serais plus là moi non plus le lendemain.
A peine le temps de faire un gros bisou à maman et chéri que je me retrouve déjà sur la table d’opération à me faire anesthésier localement.
Quelques minutes après l’ouverture de mon bas ventre, j’entends l’anesthésiste s’exclamer : « votre petite est là, elle est bel et bien vivante …. ». je n’ai même pas pu la voir ; il l’emmenait déjà auprès des pédiatres pour les premiers soins et la mettre de suite en couveuse. Au loin j’entends un bébé criait ; je me disais qu’une femme devait être en train d’accoucher à côté jusqu’à ce qu’on me dise que c’est mon bébé qui crie !!!!! Bon dieu de merde quel soulagement de l’entendre !!!!!
On me la montre vite fait dans sa couveuse avant de l’emmener en réa ; qu’est-ce qu’elle est belle bon sang !!! Qu’est-ce qu’elle est rose !!! Si petite mais tellement vivante et là !!!
Moi je passe la nuit en réa ; je ne dors pas une minute ; je demande sans cesse aux infirmières d’appeler la réa pour avoir des nouvelles de ma fille, qui, me dit-on se porte bien. On m’administre des tonnes de morphine mais rien n’y fait, je souffre le martyre. Mais je m’en fous, je ne pense qu’à ma fille.
LE LENDEMAIN DE LA CESARIENNE EN URGENCE
Le lendemain matin, j’ai le droit à ce qu’ils appellent la première levée du lit ; mon dieu je n’ai jamais autant souffert de ma putain de vie ; j’ai tellement mal mais une fois de plus je m’en fous car on me dit que si je n’arrive pas à me lever on ne m’emmènera pas voir ma fille en fauteuil roulant. Je réunis une fois de plus toutes mes forces et hop je suis debout … enfin à moitié ….. mais je suis sur mes pieds. Le chirurgien qui m’a opéré vient me voir dans ma chambre et m’annonce une fois de plus froidement que je leur ai causé bien des soucis durant l’opération ; mon utérus était sanguinolent à peine ils le frôlaient, j’ai une très grosse infection et apparemment, j’étais bourrée d’oedèmes à l’intérieur.
LA PREMIERE RENCONTRE AVEC MON ANGE
Vers 13h on m’emmène enfin voir ma petite fille ; je la vois là, dans sa couveuse, si petite, si frêle, branchée de tuyaux dans tous les sens, de perfs et tout le toutim. Là je craque comme une gosse ; je verse des tonnes de larmes, je n’arrive plus me contrôler. J’ai tellement mal de la voir ainsi. Même les paroles rassurantes de sa nounou ne me font plus aucun effet. Mon dieu mais pourquoi ???? Pourquoi je n’ai pas été capable de mener cette grossesse jusqu’au bout ??? Pourquoi ma fille ??? Pourquoi putain de merde ????
PREMIERE SEMAINE DE VIE PARMI NOUS
Sa première semaine de vie a sûrement été la plus éprouvante de ma vie ; bien entendu comme tous les bébés elle a perdu un peu de poids, sauf que pour elle ça l’a fait descendre jusqu’à environ 940g. Elle a très vite repris son poids de naissance ; une semaine après.
Elle a très vite su gérer son oxygène ; elle est restée à 30% même pas une semaine ; puis elle est très vite passée à 21%, soit le taux d’oxygène que nous tous respirons chaque seconde, chaque minute, chaque jour, etc …. Une première victoire en quelque sorte.
LES PREMIERS ESPOIRS
Les jours passent et j’apprends très vite à devenir maman, sa maman rien qu’à elle ; je ne pleure plus jamais devant elle ; je veux qu’elle ressente toute la force que j’emmagasine pour elle ; je veux qu’elle puise en moi toute cette énergie et cette rage de vivre.
Lola évolue vraiment bien chaque jour qui passe et très vite je peux lui changer sa première couche : quel bonheur !!! Le papa aussi le fait et nous commençons tout doucement à pouvoir la prendre dans nos bras ou en peau à peau : la joie absolue !!!
Au bout de deux semaines dans le service Grande réa, on nous annonce la bonne nouvelle : Lola est beaucoup moins malade et va donc être transférée en post réa : la joie nous envahit !
Encore une nouvelle victoire ! Bravo ma fille, tu es la meilleure.
LA POST REA
En passant d’un service à l’autre, on enlève aussi quelques tuyaux et quelques perfs : c’est toujours ça en moins pour elle ; un tout petit peu moins de gêne pour ma louloute.
Elle évolue bien, prends du poids chaque jour qui passe ; environ 20 grammes par jour.
REGRESSION A CAUSE DE SON INFECTION
Et puis patatras : le 24 décembre au soir on apprend que Lola a une infection : antibiotiques obligatoires, arrêt de l’alimentation et reprise de la perf. Je craque à nouveau. On passe environ une semaine sans pouvoir la prendre dans nos bras, à se demander si elle va régresser à tel point qu’ils seront obligés de la ré intuber ….
UNE NOUVELLE VICTOIRE
Et puis une semaine plus tard, quelques grammes en plus malgré la diète et une transfusion, notre petite est sortie d’affaires : les antibio ont fait leur effet : ouf. Si ça avait mal tourné ….. j’imagine même pas …..
Reprise de l’alimentation, on enlève la perf (qui entre temps, merdait tous les soirs, donc obligé de repiquer la petite tous les jours tant ses veines sont petites) et la petite repart de plus belle !
Quelques jours après, la nouvelle nous prend d’assaut : Lola va tellement mieux que les médecins décident de la transférer dans une maternité tout près de chez nous.
On a du mal à se réjouir, la peur nous envahit, surtout qu’on a que 24 heures pour se retourner. Il va falloir à nouveau se réhabituer à de nouvelles méthodes de travail, une nouvelle équipe, un nouvel environnement, etc …. On a peur qu’ils soient moins compétents.
ARRIVEE A THIONVILLE, A BEL AIR, AUX SOINS INTENSIFS
Notre appréhension va vite diminuer : l’équipe est tout simplement formidable. C’est en compagnie de ces gens là, que nous allons ENFIN devenir de « vrais » parents.
Le plus incroyable et ce, dès l’arrivée de la petite : on lui enlève son assistance respiratoire et elle s’en sort à merveilles : Lola respire toute seule !!! De là, les progrès vont être flagrants chaque jour.
On a le droit de sortir la petite de sa couveuse trois fois par jour (et non plus une seule), on la change tous seuls, on commence à l’habiller et …. Lola découvre sa première tétée au sein !!! Mon dieu quelle joie, quel bonheur, quelle fusion entre nous deux. Je suis aux anges !
Elle fait de moins en moins de « bêtises » au scope ; Lola devient de plus en plus mature à tout point de vue.
On lui fait prendre son premier bain ! Elle adooooore ça !!!! Les journées passent plus vite dans cette ambiance là.
DERNIERE LIGNE DROITE
Et puis un soir, on annonce que Mademoiselle va tellement bien qu’elle sera transférée le lendemain à l’étage supérieur : la néonatologie. DERNIERE LIGNE DROITE ! Mais re-angoisse, re-nouvel environnement, re-nouvelle équipe, re-stress quoi !!!
Mais une fois de plus, la gentillesse de l’équipe nous fait voir le côté positif des choses : on a ENFIN le droit de faire rentrer la famille, on s’occupe SEUL de notre fille, on se sent vraiment parent à 100% là.
Voilà où nous en sommes au jour d’aujourd’hui : Lola est passée en berceau, elle mange 6 fois dans la journée 55 ml de mon lait, n’a plus aucun tuyaux, aucune perf et ne nécessite plus aucune surveillance.
On parle de sortie d’ici environ deux semaines si tout se passe dans le meilleur des mondes.
Lola a dépassé la barre des deux kilos : 2kg060 aujourd’hui ! Elle a doublé son poids de naissance tout simplement et ce, en même pas deux mois.
A présent, je n’attends qu’une seule chose : un appel de la néonat pour me dire que nous avons le feu vert du pédiatre pour la sortie de la merveilleuse Lola.
Notre combat n’est bien entendu pas encore terminé ; je n’oublierai jamais que Lola est une grande prématurée et qu’elle ne rattrapera pas son retard avant quelques mois, voire années. Mais l’essentiel est qu’elle conserve cette santé de fer et surtout cette rage de vivre que nous avons essayé de lui inculquer dès les premières heures de sa vie.
D’ores et déjà, je remercie du fond du cœur l’équipe de Nancy : pédiatres, infirmières, sages-femmes et puéricultrices pour leur professionnalisme, soutien, présence, gentillesse, leur combat à nos côtés et surtout pour avoir sauvé la vie de ma petite fille.
Je remercie également toute l’équipe de Thionville, que ce soit aux soins intensifs comme en néonatologie pour les mêmes qualités que cités ci-dessus, mais également pour nous avoir permis de devenir parents à temps complet.
NB : je ne suis pas rentrée dans les détails techniques de la grande prématurité; par contre, je reste à la disposition de tous les parents qui vivent le même combat pour la vie afin de répondre à toutes leurs questions.
Merci à tous ceux qui sont allés jusqu'au bout de mon, de notre histoire.